M6 et Canal Plus négocient avec la musique pour revoir les quotas, sous l’égide du CSA. La ministre a proposé une médiation lors du Midem, en janvier dernier, mais à l’heure actuelle, rien n’a été fait. Nous publions les demandes des uns et des autres, avec notamment une baisse drastique de la part de M6 des investissements dans les programmes de musique. (Publié le 20 février)
Plus aucune nouvelle ! Au dernier Midem la ministre de la Culture et de la Communication avait déclaré aux représentants de la filière réunis qu’elle avait l’intention de lancer une médiation avec les chaînes de télévision. L’objectif serait de mettre sur la table les divergences sur le délicat dossier des quotas de diffusion de musique sur le petit écran. Sur ce dossier, la filière commence à comprendre qu’elle a été la victime d’un stratagème mis en place par les grands groupes de communication : ils montent des dossiers avec des projets de chaînes orientées vers la musique pour plaire aux autorités et une fois la fréquence en poche, les bonnes intentions restent dans les cartons !
Le constat réalisé par la musique est accablant pour les chaînes et particulièrement celles du groupe M6. Le summum est atteint avec W9 dont la convention d’origine signée avec le conseil supérieur de l’audiovisuel prévoit 50% de diffusion de programmes « musicaux » et qui réussit l’exploit de remplir cette obligation sans que le moindre artiste ou clip n’apparaisse en prime time à l’antenne. Les mesures réalisées lors du premier semestre 2012 par Yacast montrent clairement cette impasse de la part de la chaîne sur la musique entre 20h00 et 23H00.
Pas de musique au meilleur moment, et de plus la chaîne est hors des clous sur ses obligations. Yacast a mesuré un pourcentage de 34% de diffusion de musique sur cette même période… Loin des 50% donc. Enfin, ces programmes, essentiellement des clips, sont vus par les insomniaques et les fêtards échoués, car ils sont à l’antenne en forte concentration entre 1 heure du matin et 11 heures ! Rien ou presque à des horaires diurnes décents… Les chiffres sont encore plus criants pour M6. Bien entendu, cela fait longtemps que la chaîne n’est plus à dominante musicale. Aujourd’hui M6 est une généraliste qui s’assume, en concurrent direct de France 2 et surtout TF1. Cependant, la chaîne conserve 20% d’obligations sur la musique. Alors, la direction des programmes concentre le tir sur une fenêtre encore plus étroite, soit entre 2 heures et 8 heures du matin.
Il serait trop facile d’accuser le groupe M6 d’être le vilain petit canard. Le rapport de Yacast sur les autres chaînes hertziennes susceptibles de diffuser de la musique montre l’ampleur du désastre pour la filière. Le service public ne remplit visiblement pas du tout son rôle, avec au mieux 3,3% de musique sur France 4, et un piètre 2,2% sur France 2. Une situation qui ne va pas s’arranger pour la musique puisque France 4 devrait être reformatée bientôt pour faire place à une programmation en direction des publics jeunes et enfants.
C’est lestée de ce constat sans appel que l’industrie attend de rencontrer les chaînes de télévision. Depuis l’annonce tonitruante de la ministre, la musique n’a plus de nouvelle de cette médiation. L’horloge tourne … Le CSA a organisé des auditions auxquelles ont participé les organismes de la filière musique, pendant lesquelles bien entendu il a été demandé que les obligations actuelles des chaînes soient au mieux renforcées et dans le pire des cas, respectées.
Du côté des diffuseurs, le groupe M6 souhaiterait que ses obligations d’investissement dans les programmes musicaux soient revus nettement à la baisse. Le groupe, filiale de Bertelsmann, doit dépenser 21 millions d’euros par an à ce titre. Les quotas de diffusion de M6 sont passé de 30 à 20% au cours des années, notamment lors de l’allumage de W9, mais les obligations d’investissement sont identiques. Le groupe M6 serait favorable à un nouveau seuil de 14 millions d’euros. D’autre part, le groupe demande que la notion de quotas de musique soit élargi pour prendre en compte d’autres genres d’émissions et ainsi mieux remplir ses quotas. Enfin Canal Plus a récupéré avec D17, ex Virgin 17, un vieux contentieux sur les quotas de musique. La chaîne a le niveau le plus élevé du PAF avec 75% de programmes de musique, et le groupe Canal Plus voudrait les abaisser à 60% mais avec un effort porté sur le « qualitatif« . Une notion assez vague qui mérite d’être définie.
Sur ce dossier l’action de la ministre Aurélie Filippetti est attendue avec impatience par la filière musique, un peu moins par les chaînes de télévision. D’autant que ces dernières subissent depuis 2012 une crise importante du marché de la publicité. La perspective d’un renforcement de leurs obligations en matière musicale ne risque donc pas de les enchanter.